Quand des entrepreneurs font trembler une industrie surpuissante

« Les ventes de cigarettes ont reculé de 8% en Mars 2014 » Jean-philippe Ballasse, présentateur sur Europe 1 le 2 mai dernier, à l’occasion de l’interview du président de l’AIDUCE. Ce dernier, vapoteur chevronné, présente la cigarette électronique comme « un miracle ». Et pour cause, la cigarette électronique est le moyen de sevrage tabagique le plus efficace connu à ce jour. Mais tant il est vrai que Brice Lepoutre a raison sur un plan sanitaire, sa qualification miraculeuse de la cigarette électronique prend également son sens sur le plan économique. Nous revenons sur ce phénomène grâce notamment aux points d’éclaircissement apportés par une étude Xerfi.

Une innovation majeure sur un marché verrouillé

La cigarette électronique a de miraculeux premièrement qu’elle est une innovation dite produit, donc une innovation qui porte sur la nature même d’un produit : comme l’on peut passer d’un journal télévisé à un journal papier. C’est un genre d’innovations qui se produit très rarement et qui a pour caractéristiques de bouleverser un marché.

Cette innovation est d’autant plus intéressante qu’elle s’est déroulée sur un marché réputé inaccessible : celui du tabac. En effet, il semblait inimaginable il y a encore cinq ans d’apporter un forme de progrès sur le marché de la cigarette. Les seules innovations mineures récentes étant l’intégration dans le filtre d’une capsule contenant des arômes.

En 1965, Herbert A. Gilbert dépose un brevet contenant le projet d’une cigarette électronique remplaçant le tabac par de la vapeur. Son projet ne se verra jamais approché par l’industrie du tabac alors. Ce n’est que bien plus tard qu’un ingénieur chinois, Hon Lik, dépose un brevet sur une « Cigarette sans fumée à vaporisation électronique », en 2005. A ce moment, la technologie envisagée est celle des … ultrasons !

La technologie avec résistance chauffante comme on la connaît aujourd’hui n’apparaît qu’en 2008, résultant du travail d’un autre chinois, David Yunqiang Xiu. Dès lors elles sont produites massivement dans la région de Shanghai et Shenzhen. Pour l’histoire, le créateur aurait poursuivi les recherches déjà menées dans le domaine afin de fournir à son père, atteint d’un cancer du poumon et grand fumeur, un produit de substitution efficace pouvant l’aider à arrêter de fumer.

Mais revenons à notre marché, dès 2008, la cigarette électronique représente une innovation dite de rupture, car elle rompt avec les canons technologiques du marché traditionnel.

Modification de la structure du marché

La cigarette électronique a été le point de départ pour de nombreux entrepreneurs qui ne faisaient pas parti de ce marché traditionnellement. Comme cela se produit très rarement, un marché oligopolistique, contrôlé par quelques multinationales, est devenu atomisé : de nombreux acteurs se sont jetés sur le marché. En témoignent, rien qu’en France les 2000 points de vente déjà existants et les trois boutiques qui s’ouvrent chaque jour en France.

Par ailleurs, la cigarette électronique n’a pas que bouleversé que l’offre mais également la demande. Le vapotage constitue encore à ce jour, et malheureusement plus pour longtemps, un vide juridique. Aussi est-il possible de vapoter encore dans les lieux publics. Pour la première fois, un bien de substitution efficace au tabac traditionnel fait son apparition et pour la première fois également, des fumeurs très réguliers et de longue date parviennent à quitter le tabac pour aller sur la cigarette électronique. Le phénomène est si important que l’on compte déjà 1,5 millions de vapoteurs rien qu’en France.

Les revenus de la cigarette électronique

Pour un marché aussi jeune, la cigarette électronique a connu une croissance exponentielle. En France, ce marché est évalué à un chiffre d’affaires de près de 275 millions d’€. Et sa croissance proportionnelle à la décroissance du marché du tabac, qui enregistre des baisses record. Le marché du tabac n’avait jamais connu un tel revers, les différentes hausses de taxes dans l’espace européen n’ayant jamais été reportées que sur les consommateurs finaux. On comprend ainsi plus aisément le désir des acteurs surpuissants de ce marché de faire pression sur la commission européenne, et ils ont réussi, pour qu’elle légifère en la matière. Et oui, même si l’on peut croire naïvement l’argument sanitaire avancé par les autorités européennes, il est évident qu’il ne s’agit que d’une histoire d’influence dans le meilleur des cas, et d’argent dans le pire. Et il n’y a pas en Europe que l’on essaie de couper l’herbe sous les pieds des vapoteurs, en témoigne notre article sur le congrès américain.

Les perspectives actuelles pour ce marché

Ce qu’il faut comprendre, c’est que la cigarette électronique est une gigantesque épine dans le pied pour deux industries lobbyistes surpuissantes dans le monde aujourd’hui : celle du tabac que nous avons assez évoquée, et celle de l’industrie pharmaceutique qui voit d’un mauvais œil s’écrouler, mois après mois, les ventes de ses divers produits de substitution tabagique à l’efficacité plus que médiocre.

La cigarette électronique est déjà embourbée dans une logique de réglementation drastique. Divers gouvernements européens prennent déjà des mesures de restriction, en s’appuyant déjà sur des rapports financés… par l’industrie pharmaceutique : à lire absolument, notre article sur les recommandations de l’OFT, si vous aimez rire, bien sûr (ou pleurer).

L’état français a deux ans, à compter d’aujourd’hui, pour légiférer sur la cigarette électronique. Trois cas de figures pourront alors se produire : la cigarette électronique reste un produit de consommation courante et conserve sa fiscalité actuelle : la TVA ; la cigarette électronique devient un produit de sevrage tabagique et c’est l’industrie pharmaceutique qui récupère le pactole ; enfin la cigarette électronique devient un produit du tabac, ce qui est un non-sens vu qu’elle ne contient PAS de tabac, et c’est alors l’industrie du tabac qui se frotte les mains puisque la cigarette électronique se verra taxée non pas à 20% (régime de TVA normal actuel) mais à 81% comme les cigarettes.

Vous l’aurez compris, la cigarette électronique fait l’objet de macro-prédateurs et s’il faut que vous reteniez une seule chose de cet article, c’est que c’est nous, vapoteurs, qui en payerons le prix. Pour cette raison et pour toutes les autres raisons que nous avançons dans notre article édifiant sur l’achat de la cigarette électronique étant un geste citoyen, il vous faut dès à présent soutenir l’action de l’AIDUCE, qui n’a pour vocation que de protéger le droit des citoyens de survivre à leur néfaste addiction au tabac.

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